Partenaire en 2021, e-nno s'allie à nouveau à Red lab et participera au hackathon 2022. Son CEO et co-fondateur, Maël Perret, revient sur le déploiement de la solution proposée par son entreprise.
E-nno a développé une solution d’optimisation énergétique des bâtiments. La technologie permet d’échanger des données avec les installations techniques, de manière à en apprendre davantage sur le comportement thermique du bâtiment et à identifier les gisements d’économie d’énergie. Des algorithmes d’optimisation permettent ensuite de moduler la production de chaleur et réaliser des économies de 10% à 30%. La technologie s’adapte à tous les systèmes de chauffage et à tout type de bâtiment, ce qui est particulièrement pertinent au regard de l’hétérogénéité du parc immobilier suisse.
Pouvez-vous nous en dire plus sur l’évolution des ventes du produit ces dernières années ?
Nous n’avons trouvé aucune technologie qui permettait d’optimiser la consommation des bâtiments existants tel que nous souhaitions le faire. Nous l’avons donc développée.
Un des gros enjeux avant de pouvoir la commercialiser était de pouvoir tester la technologie en situation réelle. Le plus difficile a été de trouver les 5 premiers bâtiments à équiper. Les propriétaires pensaient qu’on allait « dérégler » les installations et les chauffagistes qu’on allait leur « piquer » leur travail. Le « on a toujours fait comme cela, pourquoi faudrait-il changer » est tenace.
Notre technologie est au final assez récente, nous avons pu la mettre sur le marché en 2019. Pour réussir à convaincre tous les acteurs, nous nous sommes employés à développer le produit pour amener de la valeur à tout le monde. Aujourd’hui, nous avons plus d’un demi-million de m2 équipés et l’équivalent dans le planning des installations. Nous espérons continuer sur cette tendance en 2022.

Est-ce qu’il y a eu des éléments déclencheurs qui ont permis de faire des sauts en termes de déploiement? Démarrer les ventes? Si oui, lesquels?
Notre stratégie a été d’attaquer plusieurs marchés, afin de voir comment ils répondaient. De manière intéressante, ce sont les fonds immobiliers qui ont le mieux réagi. Cela leur permet de montrer à leurs investisseurs qu’ils sont actifs et qu’ils se préoccupent de la « santé » de leur parc. Ils ne vont pas chercher les économies financières à court terme. Il y a un consensus sur la nécessité de transformer son parc et que c’est ce qui va garantir la valeur des biens à long terme dans un marché où les investisseurs et les règlementations sont de plus en plus exigeants.
Quels sont les 3 facteurs clés qui permettraient de déployer de manière massive votre technologie ?
Au niveau du cadre légal, l’augmentation du prix de l’énergie ou une taxe CO2 est un facteur clé pour montrer l’intérêt des économies d’énergie.
La loi du bail est un autre problème. Malgré les subventions et les déductions fiscales possibles, au final c'est le locataire qui paie les charges et le propriétaire n'est pas incité à investir pour faire des économies d'énergie. Puisqu’on parle de législation, il serait bien entendu possible de rendre l’optimisation obligatoire. Les pouvoirs publics pourraient davantage jouer leur rôle d’exemplarité. Ils pourraient montrer que l’optimisation fonctionne, pour inciter d’autres propriétaires à faire de même.
La formation joue un rôle important. Il n’y a pas de formation aux nouvelles technologies et à ce que les données peuvent amener à ce secteur. Les chauffagistes continuent à apprendre à dimensionner un bruleur à mazout, alors que nous ne sommes plus sensés, pour des questions de transition, en installer.
Au final, dans notre domaine d’activité, nous voyons que ce sont plus les grands acteurs qui sont moteurs. Les pouvoirs publics, l’administration comme le législateur, ont un rôle clé à jouer. Il faut du courage politique pour concrétiser ces changements.
En cas de croissance hyper rapide, quels sont les principaux défis que vous anticipez?
Nos enjeux seront certainement:
- garantir l’infrastructure IT et le traitement des données. Nous remontons des données toutes les 15 minutes et cela nécessite une certaine infrastructure. Si nous devons la faire croître rapidement, il faudra pouvoir suivre ;
- la pénurie de composants électroniques, de plus en plus d’actualité, pourrait être un problème ;
- la gestion de la croissance, qui nécessite de la main d’œuvre, faire évoluer son organisation, des liquidités, etc.
Pour l’instant nous ne faisons heureusement pas face à une pénurie de main d’œuvre. En outre, avec nos technologies nous pourrions tout à fait travailler avec des personnes qui ne sont pas en Suisse. Cela limiterait les contraintes.
D’autres remarques ?
De manière générale, on doit compter sur l’évolution technologique pour accompagner la transition. Les nouvelles innovations peuvent amener beaucoup de choses. Mais on ne pourra pas faire qu’avec la technologie.
Faut-il plus soutenir le déploiement des solutions? Difficile de répondre à cette question. La Suisse doit montrer qu’elle existe et elle le fait sur le terrain de l’innovation, pas forcément sur le déploiement de ces innovations sur son territoire. Ceci dit, mieux accompagner le déploiement des solutions, c’est aussi favoriser l’émergence de nouvelles innovations.
Il y a clairement trop de travail administratif pour avoir accès à des fonds. Si le processus pour y accéder était plus simple, il y aurait peut-être plus de projets. Les start-ups doivent évaluer le temps nécessaire pour les demander, et le mettre en relation avec le risque de ne pas obtenir les fonds. Il est souvent préférable de consacrer ce temps à l’acquisition de nouveaux clients.
La prochaine édition du Hackathon Red lab aura lieu les 12,17 et 19 mai 2022. Pendant ces 3 jours, des participant-es issu-es du domaine de l’énergie, de la smart city des data science, de l'immobilier et du marketing co-créent des solutions concrètes et innovantes. Un objectif commun: réinventer le système énergétique grâce à l’utilisation des données.
15 partenaires nous ont déjà rejoint pour cette nouvelle édition: Innosuisse, Etat de Vaud, Suisse Energie, Centre de recherches énergétiques et municipales, Energy Living Lab Association, HES-SO Valais-Wallis, EPFL, HEIG-VD, HEPIA, HEIA-FR, Romande Energie, ENCO Energie-Consulting AG, E-nno Switzerland SA, CleantechAlps, Alp ICT et Swiss Statistical Design and Innovation (Swiss-SDI)